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9 Puntarenas, Tarcoles

  1. Costa Rica: Musée de l’or
  2. Costa Rica: Musée de l’or (suite)
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  5. 5 Monumento nacional Guayabo
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  7. 7 Parc Carara
  8. 8 Fleuve Sarapiqui
  9. 9 Puntarenas, Tarcoles
  10. 10 Inventaire
19 min - temps de lecture moyen
20 février au 8 mars 2015
Séjour naturaliste guidé par Dimitri Marguerat – Groupe : 2 Suissesses (Anna-Maria et Joseline) – 1 Provençale (Pascale) – 5 du Pays basque (Jean-François, Viviane, Pascal, Jean-Louis et Cathy)
vendredi 20 février au dimanche 8 mars 2015
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Logo de Arroz Sabanero
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Paquet de riz de Arroz Sabanero

Dans la région côtière entre Tarcoles et Dominical, je remarque de nombreux panneaux “Se vende” (A vendre) ou “Beach lots titled properties” (Lots sur plage avec titres de propriété) : la spéculation immobilière bat son plein le long du Pacifique. Je note aussi “Aqui producimos Arroz Sabanero” (Ici nous produisons du Riz Sabanero). Ne sachant pas à quoi cela correspond, je cherche ce terme sur Internet : Arroz Sabanero est une entreprise qui se dédie à l’industrialisation, la commercialisation et la distribution du riz et de ses sous-produits. La voix off à l’ouverture du site signale qu’il s’agit d’un riz bien blanc enrichi en zinc (oligo-élément), selenium (oligo-élément anti-oxydant) et acide folique (vitamine B9). Sur le logo, un cowboy à cheval en train d’attraper une bête au lasso rappelle l’épopée des pionniers, bien que cela n’ait rien à voir avec la riziculture. J’imagine que c’est pour valoriser l’idée de la conquête de l’agriculture sur une nature sauvage et celle de l’appropriation des terres. Une autre pancarte affiche “Cyperkill : contra los insectos” (contre les insectes). A ce propos, le site du ministère de l’agriculture français annonce “Intrant retiré : Cyperkill 10F”, société Agriphar S.A., première autorisation 01/02/1995 et en vert très peu lisible sur fond blanc, délai d’utilisation 30/11/2012 et délai de distribution 30/11/2011, en rouge, Retrait définitif 4/05/2011.

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Message publicitaire de la société multinationale Gruma

Nous passons devant une grosse usine appelée Gruma. C’est une multinationale qui opère aux États-Unis, en Europe, au Mexique, Vénézuéla, Amérique centrale, Asie et Océanie (!) et qui produit des farines de maïs, tortillas, snacks, riz, palmito, haricots. Sur son site Internet, je constate qu’elle fait attention à son image, un diaporama défile en page d’accueil dont je remarque les deux messages suivants : “Sélection des matières premières à hauts standards de qualité, reflet de notre engagement pour offrir les meilleurs produits” avec une photo de champs tirés au cordeau, dédoublée par le milieu comme dans un miroir pour accentuer l’idée d’équilibre et de perfection, et “En harmonie avec l’environnement, raison pour laquelle nous utilisons une technologie de pointe qui nous permet de protéger notre planète”, avec la photo d’un bonsaï dans les mains, qui représente à mon sens une nature totalement anthropisée, pliée aux désirs humains, soit tout le contraire d’une nature libre et sauvage. Le Costa Rica est bien petit pour lutter contre ces géants.

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Message publicitaire de la société multinationale Gruma
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Grande aigrette (Rivière Tarcoles)
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Anhinga d’Amérique (Rivière Tarcoles)

Le long de la côte Pacifique, d’anciennes bananeraies sont converties en plantations de palmiers à huile qui deviennent la culture dominante sur cette façade ouest du Costa Rica. Cela ne semble pas être toujours facile : j’observe que tout un champ de palmiers est réduit à l’état de chandelles desséchées. Ils n’ont peut-être pas supporté le cocktail de pesticides qui subsistait dans le sol et s’est mêlé aux nouveaux intrants. Voici la position du CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) au sujet des palmeraies à huile. “Pour exprimer le potentiel des meilleures semences, l’utilisation de fertilisants est indispensable. Il y a donc un risque réel de pollution, notamment des nappes phréatiques, lorsque ces intrants sont utilisés en excès et/ou au mauvais moment. Les engrais constituent aujourd’hui 60 % des coûts d’exploitation d’une plantation et sont de plus en plus remplacés par des apports de compost issu du recyclage des effluents, qui permettent d’économiser jusqu’à 15% de la facture globale de fertilisants. Côté pesticides, en revanche, le palmier à l’huile joue la carte de la chance : il n’y a, à ce jour, pas de parasite ou ravageur majeur du palmier qui n’ait pas de solution biologique. La fusariose en Afrique a été éradiquée grâce à des semences résistantes issues de programmes de sélection variétale classique. Les recherches concernant les attaques de Ganoderma en Asie du Sud-Est suivent la même voie. Des expérimentations sont également en cours pour identifier les agents responsables de la Pourriture du Cœur en Amérique latine, en utilisant les ressources génétiques apportées par l’espèce amazonienne Elaeis oleifera.”

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Iguane vert (Rivière Tarcoles)
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Hirondelle bleu et blanc (Rivière Tarcoles)

Passant devant une usine d’extraction de l’huile, nous sentons une forte odeur qui fait penser aux exhalaisons des cheminées de papèteries, en plus doux, moins âcre, mais tout aussi envahissant pour le voisinage. De même que dans notre pinède des landes, des fossés ont été creusés pour drainer les terres, travaux qui remontent sans doute à l’époque des défrichements forestiers pour introduire les plantations de bananes. Le CIRAD décrit ainsi le procédé industriel. “L’extraction de l’huile de palme à partir des fruits s’effectue par pression, sans ajout d’adjuvant chimique ou de solvant, de même que pour l’huile d’olive. Le principal défaut de l’huile de palme reste son côté un peu monolithique, car elle apporte un acide gras saturé majoritaire : l’acide palmitique. L’acide palmitique est la forme de stockage de l’énergie la plus élaborée, il a constitué un avantage évolutif considérable pour bon nombre d’espèces animales, mais c’est aussi une molécule-carrefour qui va s’accumuler dès que l’alimentation est déséquilibrée, y compris en sucres. Aujourd’hui, moins de 1 % de la production mondiale d’huile de palme est utilisée comme biocarburant. Au Sud, plus de 90 % des utilisations de cette huile sont alimentaires. Il n’y a donc pas de concurrence directe entre les utilisations énergétiques et alimentaires. Toutefois, les biocarburants ont installé une tension durable sur les cours des huiles végétales. En Europe (EU27), la consommation représente environ 20% des 5,4 millions de tonnes d’huile de palme importées chaque année. En outre, les cours des huiles végétales dépendent des cours du pétrole plus que des aléas climatiques, malgré l’interchangeabilité totale des huiles végétales.” Ces exploitations sont si rentables qu’une agence immobilière s’est mise en quête d’investisseurs français en précisant bien qu’il s’agit seulement et uniquement de la reconversion de bananeraies en palmeraies, sans déforestation.

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Crocodile d’Amérique

Sont produits à partir d’huile de palme les biens suivants :

  • Nourriture : on trouve de l’huile de palme dans un grand nombre de produits élaborés par l’industrie agro-alimentaire, en général uniquement désignée comme « huile végétale » : chips, croûtons, soupes lyophilisées, pâtes à tartiner, biscuits, lait pour bébé, sardines en boîte, bouillon de poulet instantané, mayonnaise, sauce tomate, céréales, chocolat, glaces, fromage râpé, fromages analogues, sauces crèmes fraiches, pâtes à tartes, plats préparés, sauces pré-faites, biscottes, brioches, biscuits salés et sucrés, etc.
  • Cosmétiques : savons, démaquillants, shampoings, soins hydratants, fonds de teint et autres produits de maquillage, anticernes, huiles de massage, masques (peau et cheveux) …
  • Produits ménagers : lessives, produits à vaisselle, peintures, vernis, résines, détergents …
  • Carburant : utilisée comme diester pour la fabrication d’agro-carburant.
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Crocodile d’Amérique
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Frégate superbe (Rivière Tarcoles)
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Pancarte de notre bateau-promenade

Si j’évoque cette question de l’exploitation des sols et de la communication qui est faite pour la promouvoir, c’est que l’Américain Jack Ewing rapporte dans son livre la vision très négative des zones humides qui prévalait autour de lui dans les années 1970. Parlant de la région de Dominical, un éleveur bovin lui avait fait la remarque qu’il y avait “des marais sans valeur, qui n’étaient bons à rien” et qu’il avait découvert un type de pâturage appelé ‘herbe allemande’ qui pourrait envahir les mangroves et les assécher. Par ailleurs, une dame de ses relations s’exclama devant lui : “La mangrove est si laide ! Le gouvernement devrait abattre ces arbres, drainer ce marais et le combler de terre. Ainsi, il y aurait assez de place pour que tout le monde puisse avoir une jolie cabane de week-end près de la plage !” Se fondant sur ces deux opinions, il se préparait à une vision horrible quand il visita pour la première fois l’Hacienda Baru en février 1972. Mais ce qu’il découvrit était si diamétralement opposé à ce qu’on lui avait dit qu’il se demanda s’il ne regardait pas autre chose. Cette expérience fit office de catalyseur ; elle éveilla en lui une fascination pour le restant de son existence à l’égard de ce qu’il jugeait être l’un des plus complexes écosystèmes de la planète. “Arrivant à cheval près de l’estuaire de la rivière Baru, je fus salué par le joyeux babillage d’une troupe de singes capucins qui se nourrissaient sur un figuier étrangleur, les premiers singes sauvages que je voyais en liberté. En moins d’une heure, je vis un caïman à lunettes, des savacous huppés (hérons), un coati, un boa arboricole et plusieurs iguanes verts. Je fus ébloui. Jamais plus je n’entretiendrai l’idée de convertir ce chaudron bouillonnant de vie en pâturage pour les bovins. Cette idée disparut tout simplement de mon esprit.”

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Pélicans, mouettes et limicoles sur la plage de Tarcoles
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Notre bateau-promenade sur le fleuve Tarcoles
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Pélicans bruns

Ne pouvant demeurer qu’une nuit à l’Hacienda Baru, nous nous rendons d’abord à quelques kilomètres de là dans un hôtel en bordure de plage. Tout de suite, je remarque de drôles d’oiseaux effilés, très grands, qui planent à faible hauteur tellement au ralenti qu’ils me donnent l’impression de rêver. Par quel miracle d’aérodynamisme ces frégates superbes (c’est leur nom) peuvent-elles tenir en l’air quasiment immobiles en formations coordonnées alors qu’elles n’ont presque pas de support alaire ? Soudain, le rythme s’accélère : elles se disputent une proie au-dessus de nos têtes. Sans crainte de se faire emporter au large, des urubus noirs dépècent un gros poisson mort refoulé par les vagues dans le léger clapot du bord. Je rejoins le groupe à l’hôtel d’où nous partons à pied le long de la route sur quelques dizaines de mètres pour voir la faune d’une petite lagune. Quelle pitié ! Elle est malheureusement convertie en une sortie d’égout pestilentielle dans laquelle patauge une diversité remarquable d’échassiers (sept espèces différentes et au moins une trentaine d’oiseaux dans l’eau ou perchés sur les petits arbres alentour). Quand je pense que j’ai vu une pancarte qui affichait “Cuidemos el agua : es vida” (Prenons soin de l’eau : c’est la vie) ! Les Costaricains ne manquent pas d’humour noir ! Heureusement que la plage où nous nous rendons après est plus propre, même si nous verrons le lendemain matin de bonne heure des fumées s’élever de l’extrémité où sont probablement brûlées des ordures. Sur la grève de sable et de galets des pélicans se reposent au voisinage de myriades de mouettes et limicoles. Je me suis toujours demandée comment ces derniers faisaient pour trouver leur nourriture parmi les grains de sable. Voici comment Tim Birkhead pose le problème : “Imaginez qu’on vous donne un bol de céréales et de lait auquel on aurait ajouté une poignée de fin gravier. Comment réussiriez-vous à n’avaler que le comestible ? Mission impossible, à mon avis ; or, c’est exactement ce que savent faire les canards.” L’extrémité de leur bec est truffée de récepteurs tactiles et il y en a non seulement dans l’os, mais aussi dans le palais, la peau, la langue, à l’intérieur et l’extérieur du bec. “Mon souci, dit-il, concerne les limicoles comme la bécasse et le kiwi dont le bec est assez doux et incroyablement sensible. Qu’advient-il s’ils heurtent par mégarde un rocher en sondant le sol ?”

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Limicoles (Bécasseaux Sanderling) dans la lumière rasante du soir
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Pélican (John James Audubon)
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Ibis blanc

Qui plus est, bien avant Darwin on s’interrogeait sur la présence chez les oiseaux d’un sens du goût. Ce n’est que dans les années 1970 que le hollandais Herman Berkhoudt découvrit par hasard la présence de papilles gustatives à l’intérieur d’un bec de canard, à la base de la langue, dans le palais et vers l’arrière de la gorge. Les oiseaux réagissent aux quatre mêmes catégories gustatives que nous (salé, amer, acide, sucré). Par exemple, le colibri perçoit les variations dans la quantité de sucre du nectar, les oiseaux mangeurs de fruits discernent la maturité du fruit et les limicoles, comme les bécasseaux, perçoivent la présence de vers dans le sable humide. En 1989, l’étudiant américain Jack Dumbacher se fit égratigner par un pitohui bicolore, oiseau de Papouasie-Nouvelle Guinée au plumage éclatant orange et noir, qui était connu localement pour son odeur pestilentielle et son agressivité. En suçant sa plaie, il se rendit compte que sa bouche était devenue insensible. Il goûta une plume et s’aperçut que sa saveur était extrêmement désagréable. Après enquête, il s’avéra que les ailes du “wobob” (l’oiseau dont la peau amère plisse la bouche), de même que celles du “slek-yakt” qui hantait les hautes terres, contenaient une batrachotoxine, toxine plus forte que la strychnine et semblable à celle produite par les grenouilles sud-américaines de la famille des dendrobatidés ! Comme chez les autres animaux vénéneux, sa toxicité résultait de son régime alimentaire, en l’occurence la consommation de scarabées mélyridés. Ces oiseaux de Nouvelle-Guinée, immangeables mais aux couleurs vives, évoquent les chenilles de Darwin et de Wallace dont la coloration sert d’avertissement : “Ne me mangez pas, j’ai mauvais goût !”

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Tantale d’Amérique
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Urubu à tête rouge

“Pour une raison inexplicable, regrette Tim Berkhead, les ornithologues ont eu du mal à accepter que les oiseaux puissent avoir un odorat. C’est une erreur et nous devons remercier John James Audubon, l’un des plus grands artistes animaliers de tous les temps, pour nous avoir mis sur la voie. A la fin du XVIIIe siècle, alors qu’il était enfant, il apprit que l’urubu à tête rouge trouvait sa nourriture grâce à un “don extraordinaire de la nature” : un odorat très développé. Mais en testant cette assertion, il supposa que ces oiseaux cherchaient des carcasses puantes en putréfaction, alors que, même s’ils se nourrissent de charognes, ils préfèrent les carcasses fraîches et évitent soigneusement celles qui se décomposent. En outre, selon ses propres dires, il aurait mené ses expériences avec l’urubu noir (Coragyps atratus) au lieu de l’urubu à tête rouge (Cathartes aura), le premier étant doté d’un odorat beaucoup moins développé. C’est Betsy Bang qui effectuera la première étude scientifique sur l’odorat aviaire à partir de la fin des années 1950. Chez les oiseaux, l’air est aspiré par les deux narines externes, qui sont la plupart du temps deux simples fentes dans la partie supérieure du bec. Celle-ci comporte en général trois chambres, les deux premières réchauffent et humidifient l’air inhalé, dont une partie passe dans les poumons via le bec, tandis que la troisième, située à la base du bec, contient le cornet qui comprend un rouleau de cartilage ou d’os. L’air passe entre les feuilles d’os couvertes d’une feuille de tissu abritant les nombreuses cellules microscopiques qui décèlent les odeurs avant de transmettre l’information au cerveau dans les bulbes olfactifs. Inspiré par ces travaux, Kenneth Stager décida de reprendre les expériences comportementales d’Audubon. En conversant avec un employé d’une compagnie pétrolière de Californie, il apprit que les fuites de gazoducs, dans les années 1930, attiraient les urubus à tête rouge. Le gaz renfermait de l’éthylmercaptan, substance qui sent le chou pourri et qu’on retrouve dans la mauvaise haleine et les flatulences ; elle se dégage également de la matière organique en décomposition, dont les corps d’animaux. Durant les années 80, deux savants d’Oxford, Sue Healy et Tim Guilford trouvèrent que c’étaient les oiseaux nocturnes et crépusculaires, pour l’essentiel, qui détenaient d’assez gros lobes olfactifs (qui compensent ainsi une moindre performance visuelle).

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Urubus noirs autour d’une charogne rejetée par la mer (Tarcoles)
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Pélicans et pêcheurs
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Maisonnette en bordure de plage
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Pélican brun et Tantale d’Amérique

Le lendemain matin, nous avons rendez-vous à 6h30 du matin, marée oblige, pour une balade de 3 heures et demie en bateau sur la rivière Tarcoles. Dimitri s’est soigneusement renseigné sur l’éthique de l’agence et nous constaterons qu’effectivement le pilote, peu démonstratif mais très à notre écoute, sait nous amener en douceur au plus près des oiseaux, faisant même du sur-place lorsqu’il y a une espèce un peu rare. Par contre, il fait en sorte de ne pas trop déranger les crocodiles dont il s’approche suffisamment pour nous permettre de les photographier, mais sans dépasser la distance limite où ceux-ci se sentiraient trop en danger (de toute façon, ils ont vite fait de plonger dans l’eau et de disparaître quasi complètement, sauf les yeux et les narines). Une ou deux fois, c’est même lui qui nous désigne une espèce qui nous a échappé, il est manifestement lui aussi un ornithologue amateur. Nous visitons trois milieux distincts : il part tout d’abord vers l’amont du fleuve, puis au bout d’un moment il fait demi-tour (nous sommes inquiets, car nous craignons que ce ne soit déjà fini), repasse devant l’embarcadère et pousse jusqu’à l’embouchure encombrée de bancs de sable où stationnent des dizaines d’oiseaux alignés au bord de l’eau, après quoi, il rebrousse chemin et s’engage dans un chenal parallèle à la côte où nous découvrons la mangrove. Nous avons de la chance, le temps est magnifique, la lumière très belle, le cadre somptueux et nous voyons vraiment beaucoup d’oiseaux moins colorés, certes, que ceux de la forêt, mais pour la plupart beaucoup plus grands.

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Une agence concurrente qui a une tout autre démarche
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Héron ? (Tarcoles)
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Echasse d’Amérique

Tim Birkhead évoque dans son livre le sens de l’odorat des oiseaux de mer. Voici quelques passages très résumés du chapitre concerné qui m’a véritablement passionnée, car je n’avais jamais entendu parler de ces expériences tout-à-fait novatrices et extraordinaires. “Dans leur étude, Bang et Cobb avaient examiné une dizaine d’espèces de pétrels qui, toutes sauf une, avaient d’immenses lobes olfactifs dans le cerveau. De fait, dès les premiers temps de la pêche baleinière commerciale, les marins ont remarqué l’incroyable sensibilité des albatros et des pétrels à l’odeur des abats de baleine. Les ornithologues ont désormais recours à l’amorçage pour attirer les oiseaux de mer – c’est l’équivalent olfactif de la diffusion d’enregistrements de chants d’oiseaux pour attirer les oiseaux terrestres. Différentes espèces, des pétrels tempêtes de 50 g jusqu’à l’albatros hurleur de 8 kg, se nourrissent de krill et de calmars, et parfois d’abats de baleine. Le krill et le calmar sentent-ils assez fort pour que les “tubinares” (oiseaux aux narines tubulaires) les trouvent dans l’immense et morne océan ? Dans les années 1970, des chercheurs montrèrent que les pétrels culs-blancs retournaient toujours au vent vers leurs îles de reproduction. En 1980, Gaby Nevitt constata que du krill haché attirait les puffins fuligineux, de même que de l’huile végétale mélangée à de l’extrait de krill répandue dans un océan aux vagues de douze mètres attirait aussi pétrels et albatros.”

“Elle rencontra fortuitement Tim Bates qui était le directeur scientifique d’une campagne météorologique en bateau. Il utilisait du sulfure de méthyle, substance naturelle libérée par le phytoplancton quand il est absorbé par du zooplancton comme le krill. Ce gaz se dissout dans l’eau de mer puis il est relâché dans l’atmosphère où il s’attarde durant plusieurs heures voire plusieurs jours. Tim Bates lui montra des graphiques qui ressemblaient à des chaînes de montagnes ou à des paysages. Le sulfure de méthyle n’était qu’un des composés décelables, en réalité, l’océan est chargé de paysages olfactifs qui dépendent en partie des caractéristiques bathymétriques, des accores, des monts sous-marins, etc. Elle modifia ses expériences dans cette direction et découvrit que les pétrels culs-blancs étaient attirés par le sulfure de méthyle. Poursuivant sa réflexion, elle prédit qu’un oiseau devrait voler en travers du vent pour multiplier les chances de trouver un panache et, une fois détecté, remonter au vent en zigzag pour garder le contact avec le fumet jusqu’à ce qu’il tombe sur son origine.” C’est effectivement ce qui fut observé, grâce à la pose de balises de géolocalisation par satellite (GPS) et d’enregistreur de température stomacale sur des albatros : dans la moitié des cas, ils se déplaçaient en zigzag, se fiant à leur vue le reste du temps.

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Long iguane sur le talus de la rivière Tarcolès
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Long iguane sur le talus de la rivière Tarcolès

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