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Ehüjarre

17 min - temps de lecture moyen
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Gorge calcaire d’Ehüjarre – Balade naturaliste guidée par Dimitri Marguerat (CPIE Pays basque)

Quelle faille ! On a tendance à l’occulter, mais nous vivons sur un sol mouvant, et les anciens n’avaient pas tort de penser que ces profondes blessures du sol étaient des voies de passage vers le feu des enfers. Elles ont des prolongements loin dans les entrailles de la Terre qui trouve là un exutoire facile quand elle se fâche, que les humeurs s’échauffent et qu’elle tape du poing sur la table qui tressaute. En 1660, le séisme de Bigorre, qui était probablement de magnitude 6, survint alors que Louis XIV fêtait son mariage avec l’Infante d’Espagne. Il fut ressenti jusqu’à Roquefort et Captieux en forêt des Landes, dans le département de la Gironde. “Des murs de 3 mètres d’épaisseur furent cisaillés, il n’y avait plus de cheminées à Pau, les effets se firent ressentir jusqu’à Bordeaux, les répliques durèrent 40 jours”, rapportent les témoignages.

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Schéma : Sismicité historique des Pyrénées

Bilan approximatif : entre 11 et 15 victimes pour un événement survenu vers 4 heures du matin, heure solaire, relaté du fait de la présence du roi. D’importants séismes eurent lieu dans les parages en 1750, 1814, 1854. Celui d’Arette en 1967, près de la Pierre Saint Martin au pied du pic d’Anie, avec 800 maisons détruites et un décès, eut une puissance évaluée à environ un millier de fois celle de l’explosion d’AZF à Toulouse. Pourtant, on ironisa sur la solidité des maisons béarnaises en galets. Sa magnitude était de 5,3 (intensité 8), pour une faille de 3 à 4 cm et une profondeur de 10 km. Le 29 février 1980 eut lieu celui d’Arudy, au seuil de la vallée d’Ossau, de 5,4 sur l’échelle de Richter (intensité 7,5) et en 2002 celui d’Estaing dans l’Aveyron (Midi-Pyrénées), de magnitude 4,8 (intensité 6).

zoom plaques
Schéma : Plaques continentales

En fait, sur le secteur d’Aramits-Arette, on enregistre de légères secousses toutes les semaines, qui sont captées par le RSSP (Réseau de Surveillance Sismique des Pyrénées). Les 20 stations de l’Observatoire Midi-Pyrénées, alliées aux autres réseaux français et espagnols, enregistrent environ 600 séismes chaque année. La zone Pyrénées Atlantiques – Hautes Pyrénées est la plus sismogène en France métropolitaine et, au regard des différentes analyses scientifiques, le secteur présentant le maximum de probabilités d’un séisme majeur se situe autour de Lourdes et d’Argelès-Gazost. Comme si cela ne suffisait pas, les activités humaines perturbent cette zone déjà instable. L’extraction du gaz de Lacq initiée en 1952 par Total induit une activité sismique qui a connu un pic en 1969. Entre 1972 et 1974, 3000 mini-séismes ont été enregistrés d’une magnitude proche de 4. De même certains barrages, notamment dans la région de Pampelune, du fait de la composition des couches géologiques, peuvent influer sur les mouvements souterrains.

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Lathrée clandestine

– En comparaison, le séisme du 11 mars 2011 au Japon était de magnitude 9 sur l’échelle de Richter à l’épicentre dans la mer, et encore de 7 sur les côtes nippones à 130 km de là et 6 jusqu’à 300 km au sud. Le facteur aggravant a été le tsunami qui est allé jusqu’à 10 km à l’intérieur des terres et a ravagé 600 km de côtes. Celui de Haïti du 12 janvier 2010 était de 7 à 7,3. Théoriquement, la magnitude des séismes pyrénéens ne devrait pas pouvoir dépasser 6 sur l’échelle de Richter, leur incidence ne porterait donc “que” sur l’Aquitaine-Midi-Pyrénées et le Nord de l’Espagne. En France, la centrale nucléaire la plus proche de l’épicentre potentiel est celle de Golfech. En second lieu, il y a celle du Blayais, au nord de Bordeaux, qui a déjà frôlé la catastrophe lors de la tempête de 1999, avec l’inondation d’une partie des installations. En Espagne, Lemoniz I et II au Pays basque, Santillan en Cantabrie sont des projets qui ont été stoppés par le moratoire, suite à l’accident nucléaire japonais de 2011. La centrale nucléaire Santa María de Garoña, située dans la province de Burgos et ouverte sur l’Ebre, a sa fermeture prévue pour juillet 2013. Plus loin, il y a encore les centrales nucléaires d’Ascó et de Vandellós II en province de Tarragone, au sud de Barcelone.

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Schéma : Coupe interprétative du massif de la Pierre St-Martin

Nous nous promenons dans la zone charnière tout à fait intéressante du village de Sainte-Engrâce à partir duquel on peut visiter les très touristiques gorges de Kakuetta, la non moins touristique grotte de la Verna récemment ouverte au public et les gorges d’Ehüjarre, moins connues car moins accessibles. Les montagnes alentour présentent un relief particulier avec une succession de petits sommets verdoyants aux pentes douces en forme d’amphithéâtres qui surmontent le calcaire aux fortes pentes entaillées de canyons vertigineux. Les sommets dont les couches géologiques sont de type flysch (succession de calcaires gréseux et de calcaires marneux) reposent ici sur le fameux calcaire des canyons, importante composante du karst du massif de l’Anie, comme le fait ressortir la coupe géologique nord-sud ci-contre. Il y pousse une flore aux caractéristiques souvent originales qu’il n’est pas possible de comprendre si l’on ignore l’histoire géologique qui la conditionne en grande partie, indépendamment du climat et de la météorologie du moment.

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Schémas : Profils ECORS-Pyrénées

Les plaques continentales s’étaient donc unies pour la dernière fois pour former la Pangée, générant une immense chaîne de montagne qualifiée d’hercynienne il y a quelque 300 millions d’années. Celle-ci s’est érodée, et l’on en voit des vestiges en divers endroits, en Bretagne, en Galice, au Portugal. Elle englobait également l’espace où se situent aujourd’hui les Pyrénées. Lorsque les plaques de la croûte terrestre ont recommencé à se dissocier vers -120 millions d’années, l’Atlantique Nord s’est d’abord ouvert, puis l’Atlantique Sud. Le Golfe de Gascogne s’est formé entre –115 et –80 millions d’années par arrachement de la petite plaque ibérique qui a basculé pour s’encastrer finalement sous la plaque eurasiatique vers -65 millions d’années, tandis qu’un bourrelet de montagnes se formait à l’intersection. La Faille Nord-Pyrénéenne (F.N.P) marque la limite des deux plaques.

geologie
Schéma : Cadre géologique régional

C’est un profond accident géologique qui court grosso-modo de Saint-Paul de Fenouillet dans le Roussillon jusqu’au Pays Basque. C’est par ce système de fractures, correspondant à la zone de contact entre les anciens continents ibérique et sud-européen que s’évacuent les trop-pleins d’énergie, initiant les séismes. L’énergie est dégagée par la convergence des deux plaques qui, elle-même, est conditionnée par la convergence des plaques Afrique et Eurasie. Cette dernière convergence est faible, de l’ordre de 1 cm/an à la longitude des Pyrénées et celle entre les deux micro-plaques est encore inférieure. Elles engendrent une surrection de la chaîne de l’ordre du millimètre par an qui se poursuit toujours, comme celle des Alpes, et qui est constatée par des mesures GPS. D’autres failles ou systèmes de failles coexistent avec la F.N.P. Dans la partie centrale de la chaîne, un accident d’orientation Nord-Ouest/Sud-Est, la faille de l’Adour, recoupe la F.N.P.

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Gorge calcaire d’Ehüjarre

Le régime de compression des failles est Nord-Sud. Une extension Est-Ouest ainsi qu’un coulissage dextre et senestre se vérifient également. La sismicité instrumentale montre que pour les Pyrénées Occidentales les séismes sont principalement regroupés le long de la F.N.P. Pourtant, en affinant l’observation, on s’aperçoit qu’à l’Ouest de Lourdes les épicentres s’alignent le long de courts segments orientés approximativement Nord-Sud. S’y ajoute au Nord-Ouest de Pau l’essaim de sismicité associé à l’extraction du gaz de Lacq. L’exploitation a cessé, mais l’activité induite se poursuit. La zone sismogène se situe entre la croûte cassante et la couche ductile, c’est-à-dire entre 15 et 25 km de profondeur. Dans les Pyrénées occidentales, la structure visible en surface y est moins nette car la zone Nord-Pyrénéenne et la zone axiale primaire s’enfouissent là sous une épaisse couverture crétacée et tertiaire, le flysch basque, dont émergent toutefois deux massifs primaires. Celui du Sud (les Aldudes) est considéré comme une réapparition de la zone axiale, et celui du Nord (Cinco-Villas) comme un massif satellite parce que, entre les deux, il y a une zone de marbres, c’est-à-dire une zone métamorphique qui pourrait appartenir à la zone Nord-Pyrénéenne. Ce hiatus entre les Pyrénées atlantiques et le reste de la chaîne est probablement dû à une grande cassure complexe, d’origine tardi-hercynienne, la faille de Bigorre, qui a rejoué au Néogène.

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Gorge calcaire d’Ehüjarre

Selon les explications de l’association Geolval, la région de La Pierre Saint Martin est constituée par des dépôts du Crétacé supérieur. Lors de la compression pyrénéenne, les turbidites de l’Unité d’Orhy-Lakhoura (à l’ouest de Sainte-Engrâce) ont été charriées sur les dépôts plus méridionaux, provoquant le décollement des calcaires à silex de l’Unité du Soum de Leche sur les calcaires massifs de La Pierre Saint Martin de l’Unité d’Anie. Les calcaires de plate-forme de La Pierre Saint Martin présentent une fracturation liée à une phase extensive, consécutive à la mise en altitude du massif. Le calcaire de La Pierre Saint Martin et le calcaire à silex sont entièrement recristallisés, transformés en véritable marbre, sur une épaisseur pouvant dépasser deux mètres, ce qui rend la roche beaucoup plus résistante à l’érosion : elle constitue la surface des Arres d’Anie et du Soum Couy. Au niveau des failles extensives se situe le départ de gouffres.

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Gorge calcaire d’Ehüjarre
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Hêtres aux troncs soudés à la base et à mi-hauteur

Quatre étapes essentielles caractérisent l’évolution des karsts pyrénéens. Tout d’abord, la fracturation des carbonates intervient dès le Crétacé supérieur à l’articulation entre Europe et Ibérie, aux abords de la “faille nord-ibérique” et peut atteindre de grandes profondeurs. Cette étape affecte par la suite un territoire de plus en plus large, par migration centrifuge des fractures à travers les croûtes ibérique et européenne. En second lieu se produit une paléokarstification. Un réseau karstique massif, à remplissage grossier, essentiellement bréchique et de teinte beige ou grisâtre, se met en place au droit de la Zone Interne Métamorphique et de la Zone Nord-Pyrénéenne, nouvellement portées à l’émersion au cours du Paléocène et de l’Éocène. Puis une néokarstification engendre un système de galeries à la fois complexe et ténu qui recoupe le réseau paléokarstique précédent et le déborde latéralement. Son remplissage essentiellement argileux, rougeâtre et rutilant, ou calcaire, évoque les climats chauds et humides, agressifs, du Néogène.

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Un bugle normalement pigmenté

Enfin, le karst actuel, formé de puits et de galeries le plus souvent verticaux et ouverts, recoupe tous les systèmes antérieurs. La fracturation des carbonates, provoquée par l’affrontement des plaques européenne et ibérique, peut être considérée comme le facteur déterminant dans l’élaboration de ces karsts. La répartition des masses calcaires au sein de l’orogène, l’ennoyage général du bâti hercynien vers l’ouest, l’abaissement relatif du niveau marin phréatique de base lié à la surrection des reliefs ainsi qu’un contexte climatique approprié, associant chaleur et humidité, constituent des facteurs secondaires de nature à accélérer le processus de karstification. Selon le ‘Journal of the geological society‘, un dernier phénomène génère des tensions : c’est la subduction en direction du sud de la croûte océanique du Golfe de Biscaye (de Gascogne) sous la péninsule ibérique. Elle a provoqué la formation des monts cantabriques et le double tiraillement des deux continents vers le nord et vers le sud s’est traduit par l’ouverture de la Faille de Pampelune, perpendiculaire à la chaîne pyrénéenne, et qui a eu lieu dès l’orogenèse hercynienne, avant la formation des Pyrénées actuelles. Cette faille se situerait sous les Aldudes, l’Artzamendi et le mont Ursuya, légèrement à l’ouest de Saint Jean Pied de Port et de Salies, et à 20 ou 30 kilomètres à peine à l’ouest de Sainte-Engrâce.

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Et un bugle atteint de leucisme

Le thème de notre balade est intitulé “Explosion de fleurs et de couleurs en Haute-Soule, dans les gorges d’Ehüjarre”. Elle fait suite à la sortie du 28 avril, “Magie des falaises, grandeur de la forêt, et passerelle d’Holzarte”. Le problème, c’est que le programme du premier semestre a été établi à la fin 2010, et que l’on est tributaire pour les randonnées naturalistes non seulement de la météo, mais aussi des variations climatiques. Or, ce printemps 2011 est exceptionnel dans beaucoup de régions européennes et nous constaterons au cours de notre périple que toutes les fleurs que nous avions observées le mois dernier ont éclos en avance, et que beaucoup ne sont plus au rendez-vous trois semaines plus tard, puisqu’ici elles en sont déjà au stade de la fructification.

Sainte-Engrâce est un petit village d’à peine 200 habitants niché tout au fond d’une vallée buttant contre le massif calcaire de La Pierre Saint Martin. Alors que nous nous apprêtons à garer nos voitures à un ou deux kilomètres du hameau en contrebas, sur un espace où la route s’élargit, nous lisons un panneau qui prévient de le laisser libre pour les camions. Nous sommes là à tergiverser quand un énorme véhicule destiné à charger les grumes coupés par les forestiers survient pour manœuvrer et nous oblige à décamper et à parquer les voitures plus haut, sur le bas-côté d’une voie d’accès ravinée et caillouteuse. Heureusement que nous ne sommes pas partis en les laissant là, nous constatons qu’il a réellement besoin de s’y prendre très au large pour tourner !

aP1110476Sitôt chaussés, nous nous engageons dans le goulet étroit et sombre, presque entièrement parcouru par le torrent que nous traversons à plusieurs reprises sur des galets instables et glissants. Nous cheminons de part puis d’autre dans une ambiance très humide, où la végétation luxuriante offre une large palette de verts soutenus. Dimitri Marguerat, notre guide naturaliste, nous mène bon train, s’attardant à peine sur les quelques fleurs des bas-fonds, persuadé que le plus intéressant se révèlera dans les prairies qui s’ouvrent en altitude. Je le regrette, car je m’essouffle et je peine, ce qui m’empêche de profiter de cet environnement quasi aquatique dont j’adore l’exubérance. Je me promets d’y retourner à un rythme plus posé et d’observer tranquillement cette végétation bien particulière. En réalité, lorsque nous arriverons au sommet, nous nous apercevrons que les fleurs sont bien moins nombreuses que prévues : la floraison a un mois d’avance. Il a neigé en altitude, mais très peu en bas cet hiver, nous fait-il remarquer.

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Lamier jaune

Selon la lettre n° 3 de l’observatoire des saisons, le début d’hiver 2010-2011 a été frais avec des températures moyennes mensuelles en-dessous des normales saisonnières. Décembre 2010 a été le plus froid depuis 1969 et il a été suivi d’un redoux en fin d’hiver qui a avancé de quelques jours les floraisons du printemps. Une comparaison entre le comportement d’une sélection de plantes entre le début du 20e siècle (1890-1919) et le début du 21e siècle (2008-2010) montre un avancement important des événements de printemps : le lilas fleurit en moyenne 7 jours plus tôt, tandis que le noisetier fleurit 49 jours plus tôt ! La feuillaison est également avancée de 8 jours pour le bouleau, 14 jours pour le lilas et 17 jours pour le noisetier. Ces résultats sont en accord avec les études publiées jusqu’à présent, qui montrent un avancement de 2 à 3 jours par décennie en moyenne. Quant aux événements d’automne, les travaux des scientifiques montrent qu’ils ont tendance à être retardés par rapport au siècle dernier.

aP1110477Ces décalages ont une incidence sur le monde animal. Par exemple, en juin la naissance des jeunes pinsons coïncidait avec une abondance de petites chenilles arpenteuses vertes, larves de la chématobie, un papillon. Un dérèglement de l’enchaînement temporel de ces évènements – jeunes feuilles, chenilles, oisillons – peut entraîner à court terme la famine et même la disparition de l’oiseau en un lieu donné. Par ailleurs, comme rien n’est simple, si l’on observe deux plantes dont l’une fleurit au mois de mars et l’autre six mois plus tard, le fait que toutes deux fleurissent en avance ou en retard indique que le réglage de leur floraison n’a rien à voir avec les aléas climatiques de l’année en cours, mais qu’il a lieu au cours de l’année précédente. Ainsi, certaines plantes fleurissent à date fixe quelle que soit l’année, que les aléas climatiques aient tendance à l’humidité ou à la canicule. Et puis, il existe aussi celles qui fleurissent en permanence (à Paris, le faux Millet, Piptatherum miliaceum Coss).

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Pavot jaune

La Lettre de Phenoclim écrite par le CREA (Centre de Recherches sur les Écosystèmes d’Altitude) fait part du même constat. Elle précise que, sous nos latitudes, la température est le facteur principal déclenchant le réveil printanier de la végétation. Mais son rôle est plus ou moins prépondérant suivant les mois. Pour les plantes, les mois essentiels sont ceux qui précèdent l’ouverture des bourgeons et la floraison. En l’occurrence, les mois de janvier et février (voire mars pour les espèces tardives) jouent un rôle primordial. Les plantes encore en phase de dormance ont donc été très peu touchées par les rigueurs de décembre 2010. En montagne, la couverture neigeuse est de première importance dans la date de floraison des espèces herbacées comme la primevère ou le tussilage. Ce dernier y est particulièrement sensible : en 2011 il a fleuri un mois plus tôt qu’en 2010 à Gua (Isère) par exemple. Un phénomène qui trouve en partie son explication dans les températures mais surtout dans la disparition prématurée du manteau neigeux. Le déficit de précipitations hivernales s’est fait sentir dans cette région des Alpes, y compris en vallée où les primevères ont fleuri avec 15 jours d’avance.

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Les observateurs notent que la date de ponte des mésanges dépend étroitement du débourrement des arbres. En effet, ils offrent alors avec leurs jeunes feuilles une nourriture de premier choix pour les chenilles… qui sont elles-mêmes dégustées par les poussins des mésanges. Dans cette mécanique bien huilée de la chaîne alimentaire, si toutes les espèces ne décalent pas leurs dates de reproduction de la même manière en réponse à l’augmentation de la température, certaines pourraient en pâtir. Qu’adviendrait-il des poussins des mésanges si à leur éclosion les chenilles avaient depuis bien longtemps fait une orgie de feuilles et s’étaient déjà transformées en papillons ? Une problématique qui ne se retrouve pas seulement dans les relations de prédation mais aussi dans la pollinisation. Contrairement au noisetier dont le pollen est diffusé par le vent, beaucoup de plantes comme le sorbier, le lilas, le tussilage et la primevère ont besoin des insectes pour être pollinisées… Il est donc essentiel que l’émergence des insectes pollinisateurs reste synchronisée avec l’apparition des fleurs.

Ehüjarre (suite)

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